Chirurgie des tissus mous

Les hernies périnéales

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Introduction

Les hernies périnéales correspondent à un affaiblissement et une défaillance des muscles du diaphragme pelvien qui se rompent sous l’effet de contraintes mécaniques.

Elles se rencontrent presque exclusivement chez les chiens mâles entiers adultes ou âgés, dans une moindre mesure chez les chiens castrés. Les femelles auraient un diaphragme pelvien plus solide que celui des mâles, ce qui expliquerait en partie la moindre fréquence de l’affection chez ces sujets. Quelques cas exceptionnels ont été décrits chez l’animal jeune.
La prévalence de l’affection est estimée entre 0,1 et 0,4 %.

Considérations anatomiques

Le périnée est la partie du corps qui ferme l’orifice caudal du bassin ; il entoure les conduits anaux et uro-génitaux. Il s’étend de la base de la queue jusqu’au dessous des testicules ou de la vulve. Il est limité latéralement par les ligaments sacro-tubéreux, dorsalement par le sacrum, ventralement par l’arcade ischiatique.

Quatre muscles participent à la formation du diaphragme pelvien : le muscle coccygien, le muscle élévateur de l’anus (divisé en un faisceau ilio- caudal et un faisceau pubo-caudal), le muscle sphincter de l’anus (divisé en un faisceau superficiel, un faisceau profond et un faisceau cutané). Finalement, le muscle obturateur interne recouvre le trou obturateur.

L’irrigation de la région est assurée par l’artère honteuse interne qui provient de l’artère iliaque interne. Elle croise latéralement le muscle élévateur de l’anus et se dirige en région ischiatique en longeant le muscle obturateur interne. L’artère glutéale caudale et ses ramifications participent également à l’irrigation du périnée (figure 1).
Le nerf honteux est le nerf principal du périnée. Il se divise en plusieurs branches qui innervent notamment le muscle sphincter externe de l’anus et les organes génitaux externes (figures 2 et 3).
Il convient de respecter scrupuleusement les structures nerveuses lors du traitement chirurgical de la hernie afin d’éviter des complications postopératoires telle qu’une incontinence fécale causée par des lésions du nerf caudal rectal.

Vascularisation de la région périnéale chez le chien

Figure 1 : Vascularisation de la région périnéale chez le chien (Evans).

Innervation de la région périnéale chez le chien

Figure 2 : Innervation de la région périnéale chez le chien (Evans).

Nerfs du bassin et du membre pelvien du chien, face médiale

Figure 3 : Nerfs du bassin et du membre pelvien du chien, face médiale (Barone).

Epidémiologie

Suite aux particularités musculaires du périnée, quatre types de hernies périnéales distinctes sont identifiées : sciatique (1), dorsale (2), caudale (3) et ventrale (4). La hernie caudale étant la plus fréquente, la hernie dorsale beaucoup moins, les hernies sciatiques et ventrales sont les plus rares (figure 4).
La connaissance anatomique de la zone doit être maîtrisée afin de poser un diagnostic correct et d’envisager un protocole chirurgical adapté.

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Figure 4 : Localisation des différents types de Hernie périnéale chez le chien (Noël).

Selon les auteurs et les pays, le panel de répartition peut varier énormément. Les races prédisposées aux Etats-Unis sont principalement le Boxer, le Boston terrier, le Colley, le Berger Allemand et le Caniche, le Teckel et le Bobtail, le Corgi, le Kelpie. En France, le Berger Allemand, l’Epagneul breton, le Pékinois et le Teckel sont fréquemment touchés.
Une étude montre que plus de 97 % des chiens atteints de hernie périnéale sont des mâles entiers âgés de plus de 7 ans.
Cependant, quelques cas de hernies périnéales ont été relatés sur des femelles, consécutivement à des troubles de la gestation. Un cas sur un chiot a été constaté et décrit dans une publication.

Etiopathogénie

Les causes de hernies sont probablement plurifactorielles. Cependant, l’étiologie exacte n’a pas encore été déterminée. Certaines études évoquent toutefois la possibilité d’une constipation ou d’un ténesme chronique responsable d’une atrophie neurogène des nerfs moteurs de la région périnéale.
Sans que l’on sache précisément s’il s’agit d’une cause ou d’une conséquence, on constate très fréquemment des déformations rectales dans les hernies périnéales (93 %). Ce sont le diverticule rectal, la dilatation rectale, le saccule rectal et l’inflexion sigmoïde du rectum.
On ignore si c’est la déformation engendrée par la hernie et les efforts expulsifs lors de la défécation qui entraînent les déformations du rectum ou si ce sont ces lésions qui entraînent la hernie (figure 5).
L’atrophie sénile et l’atrophie de la musculature coccygienne après caudectomie, prédisposeraient à l’apparition de hernies périnéales.
Des causes hormonales sont suspectées par beaucoup d’auteurs, quoi qu’aucune preuve irréfutable n’ait à ce jour pu être mise en évidence. Cependant, on a constaté chez des chiens mâles âgés, une augmentation significative des sécrétions oestrogéniques par les testicules, ce qui causerait un relâchement du diaphragme pelvien et une diminution des stéroïdes androgènes, causant à son tour un affaiblissement de la musculature pelvienne.

Déformations rectales rencontrées dans les hernies périnéales

Figure 5 : Déformations rectales rencontrées dans les hernies périnéales (Commère).

Les affections prostatiques sont également des causes favorisant les hernies périnéales. Les chiens atteints d’hyperplasie bénigne de la prostatique ou de kystes para-prostatiques sécrètent une quantité plus importante de relaxine. Cette dernière aurait une influence défavorable sur la musculature pelvienne, favorisant également l’apparition de hernie périnéale. De plus, la prostate hyperplasiée contribue certainement à l’apparition de la hernie par son action mécanique sur le diaphragme pelvien.
Il existe une relation étroite entre les efforts expulsifs engendrés par la constipation et la hernie périnéale. L’origine de la constipation et des efforts expulsifs peut provenir de l’alimentation ou du basculement de la prostate dans la filière pelvienne. Toute irritation ou inflammation rectale ou péri anale peuvent également engendrer de telles contractions.
Généralement, une masse sous-cutanée liquidienne se constitue dans la partie déclive de la lésion périnéale. Très souvent, de la graisse rétro-péritonéale accompagne la formation liquidienne.
Certains éléments peuvent ensuite passer au travers de la brèche herniaire : le grand omentum, la prostate, de la graisse péri-prostatique, le colon descendant, la vessie et parfois même l’intestin grêle.

Symptômes

Les principaux symptômes de la hernie périnéale se traduisent par une tuméfaction très souvent unilatérale du diaphragme pelvien, du ténesme et de la constipation. La peau peut paraître plus fine, enflammée et des ulcères peuvent se former.
Les phénomènes de dysurie, de pollakiurie, voire d’anurie sont toujours inquiétant et relèvent souvent de l’urgence chirurgicale car ils correspondent à une ectopie vésicale.
Dans une moindre mesure, de la diarrhée, de l’anorexie, une perte de poids, des vomissements, une dyschézie, une hématochézie ainsi qu’une incontinence fécale sont constatés.

Diagnostic

Il se base à la fois sur l’examen clinique éloigné puis rapproché et sur les examens complémentaires.
On recherche une déviation de l’anus, une tuméfaction du périnée, une modification de la couleur de la peau, des ulcérations ou de l’œdème.
La palpation peut donner différentes indications comme la nature des organes présents dans la hernie : prostate ronde et dure, aspect nodulaire de la graisse rétro-péritonéale, taille fluctuante de la vessie en fonction de son état de réplétion.

Un diagnostic complet doit impérativement être posé afin de réaliser la technique chirurgicale la plus adaptée possible. La radiographie et l’échographie sont donc indispensables pour connaître la nature des éventuels organes ectopiques. L’injection d’un produit de contraste dans le rectum et/ou la vessie permet d’identifier correctement à l’aide de la radiographie le ou les organes ectopiques. L’échographie permet quant à elle, d’objectiver correctement l’état de la prostate.

Le diagnostic différentiel comprend les abcès locaux ou les abcès des glandes anales, une hyperplasie des glandes anales, les tumeurs de la région périnéale (lipomes, adénocarcinomes, …), les contusions ou hématomes et l’hygroma de la pointe de la fesse.

Considérations médicales et pré chirurgicales

Le traitement chirurgical des hernies périnéales doit s’accompagner de mesures préopératoires précises.

Le traitement médical a pour but de faciliter le transit intestinal et le passage des matières fécales dans le colon et le rectum. Il est basé sur l’administration d’un aliment riche en fibres et humide de préférence. L’adjonction de laxatifs ou d’émollients (huile de paraffine) s’avère aussi intéressante. Cependant, le traitement médical seul est insuffisant pour traiter l’affection.

La vidange du système digestif participe au confort de réalisation de la chirurgie périnéale. Il est donc conseillé de réaliser des lavements biquotidiens d’eau savonneuse les 24 ou 48 heures préopératoires. Les lavements peuvent s’accompagner d’un traitement laxatif. La vacuité rectale permet un meilleur traitement des lésions. Bien entendu, les lavements colorectaux s’accompagnent d’une diète totale de 24 heures. Afin d’éviter les fuites rectales lors de l’intervention, il est important d’arrêter les lavements au moins 12 heures avant l’intervention.

Dans les cas où la vessie est présente dans la hernie, il faudra la vider par sondage ou par cystocenthèse périnéale et ensuite la replacer dans l’abdomen avec une sonde à demeure en attendant l’opération. L’animal sera également perfusé et les troubles métaboliques corrigés si nécessaire avant l’anesthésie.

Considérations chirurgicales

Une antibioprophylaxie est fortement conseillée avant toute chirurgie du périnée. Elle couvrira les germes Gram+ et Gram-. L’utilisation de Céphalexine (25 mg/kg), de Métronidazole (10 mg/kg) ou d’Enrofloxacine (10 mg/kg) est indiquée.

Les morphiniques seront utilisés pour l’analgésie et l’utilisation d’AINS (Méloxicam, Carprofène) est autorisée à condition d’avoir préalablement vérifié l’intégrité rénale.
De nombreuses techniques sont décrites pour le traitement chirurgical des hernies périnéales. Elles découlent d’un diagnostic qui doit être le plus précis possible.

Classiquement, la chirurgie des hernies périnéales s’effectue en deux temps distincts. Un temps abdominal est préconisé pour réduire l’encombrement de la fosse ischio-rectale et fixer les différents organes qui auraient pu passer dans la hernie. Le temps périnéal est réalisé 24 à 48 heures plus tard. Certains auteurs préconisent jusqu’à 5 jours entre les deux interventions, afin que l’animal récupère de sa première anesthésie.

Réalisation du temps abdominal

Il précède toujours le temps périnéal afin de le faciliter et de diminuer le taux d’échec et de récidive. Le but du temps abdominal est de repositionner les organes ectopiques et de les fixer le cas échéant. La castration sera effectuée en même temps que le temps abdominal.

Colopexie

Colopexie (figure 6)

Elle est indiquée lors d’inflexion sigmoïde du rectum et permet de réduire l’amplitude des diverticules ou saccules rectaux. Le colon est tiré crânialement, une incision longitudinale de la séro-musculeuse colique est pratiquée ainsi qu’une incision péritonéale longitudinale à mi distance entre la ligne blanche et les muscles sous-lombaires. Les lèvres des plaies sont ensuite suturées bord à bord avec un mono filament résorbable. Il est important de bien englober la sous-muqueuse intestinale à chaque point car c’est la partie la plus résistante de l’intestin. Il faut éviter par contre de perforer la muqueuse de l’intestin. Une aiguille à pointe non biseautée est requise pour la suture viscérale.

Réalisation de la colopexie

Figure 6 : Réalisation de la colopexie (Sanspoux).

Cystopexie et déférentopexie (figure 7)

La cystopexie consiste en la fixation de la vessie dans sa position de repos par rapport à la paroi abdominale. Elle est fixée à la paroi paramédiane ventrale préalablement scarifiée. De l’épiploon peut être intercalé entre la vessie et la paroi afin d’augmenter les adhérences. Quelques points simples sont posés entre la paroi abdominale et la vessie en passant au travers de l’épiploon.

Principe de la déférentopexie

Figure 7 : Principe de la déférentopexie (Sanspoux).

Grâce à la déférentopexie, les canaux déférents sont suturés latéralement à la vessie, au travers de deux tunnels percés sous le péritoine pariétal. La traction exercée sur les canaux déférents se reporte sur la prostate et contribue à maintenir la vessie en position physiologique.

Castration et chirurgie de la prostate

Sans qu’aucun consensus ne soit vraiment établi, on considère que la castration diminue le taux de récidive des hernies périnéales. L’hypertrophie de la prostate engendre des efforts expulsifs qui favorisent les hernies périnéales. La castration, en supprimant l’influence hormonale sur la prostate, favoriserait son involution, diminuant ainsi les efforts expulsifs et la constipation. Le cas échant, les lésions prostatiques seront traitées également pendant le temps abdominal.

Réalisation du temps périnéal

Avant l’intervention, l’anus sera temporairement fermé par une suture en bourse. Une compresse ou un tampon périodique peuvent également être introduits dans l’anus afin d’éviter toutes fuites de selles pendant l’intervention (figure 8). Il est vivement conseillé d’utiliser des sutures mono filaments résorbables pour les sutures internes et des sutures mono filaments irrésorbables pour les sutures externes. L’asepsie doit être rigoureuse, de par la présence possible de souillures en provenance de l’anus.

Tampon périodique placé dans le rectum

Figure 8 : Tampon périodique placé dans le rectum (Sanspoux).
La préparation de l’animal au temps périnéal comprend une diète d’au moins 24 heures, des lavements colorectaux, l’administration de laxatifs et la vidange manuelle des glandes anales.
Le patient est positionné en décubitus ventral, les membres postérieurs dans le vide, la queue relevée sagittalement et crânialement, la table est inclinée vers l’avant afin de dégager le plus possible l’abdomen postérieur. Un coussin est placé sous l’abdomen (figure 9).

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Figure 9 : Positionnement du patient pour le temps périnéal (Sanspoux).

L’abord classique de la hernie se fait de la base de la queue à la tubérosité ischiatique. Rapidement après l’incision cutanée, le sac herniaire apparaît. Il faut impérativement identifier le faisceau vasculo- nerveux honteux, les vaisseaux périnéaux dorsaux et les respecter (figure 10). Les proliférations inflammatoires et le tissu graisseux rétro péritonéal sont excisés et les organes herniés présents sont refoulés dans la cavité abdominale. Mais si le temps abdominal a été correctement réalisé, le sac herniaire doit être vide.

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Figure 10 : Dissection des muscles de la fosse ischio-rectale (Commère).
Avant toute reconstruction, les muscles du périnée doivent être clairement identifiés ainsi que le ligament sacro-tubéreux. Certains muscles peuvent être atrophiés et il est parfois difficile de les isoler.
Il existe plusieurs techniques de reconstruction périnéale. On choisira l’une ou l’autre en fonction de différents facteurs tels que la taille de la hernie, sa position ou les dégâts qu’ont subi les muscles.

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Herniorraphie simple (figure 11)

Après réduction de la hernie, les différents plans musculaires sont suturés entre eux par une série de points simples. Tous les points sont posés avant de serrer les nœuds. Les plans sous-cutanés et cutanés sont réalisés classiquement. Cette méthode ne présente pas de difficultés techniques majeures.

Les récidives peuvent être fréquentes suite aux tensions excessives sur les différents groupes musculaires. C’est pourquoi cette technique est de plus en plus abandonnée au profit de méthodes plus performantes. Cependant, elle est aisée dans sa réalisation et elle peut malgré tout offrir une solution simple et rapide à condition que la musculature périnéale soit saine et en bon état.

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Figure 11 : Herniorraphie simple (Commère).

Hernioplastie par pose d’un filet synthétique

Cette technique propose une alternative plus résistante que le traitement simple de la hernie. Différents types de matériaux sont utilisés, le plus fréquent étant le filet en polypropylène. Il est découpé en fonction de la taille du trou à combler.
La méthode présente cependant certains risques post opératoires par effet « corps étranger » : sepsis, fistule, défaut de cicatrisation, suppurations. Elle nécessite donc une technique parfaite et une asepsie rigoureuse.

Hernioplastie par pose d’une prothèse hétérologue ou autologue (figures 12-13-14)

Une technique propose le remplacement du filet synthétique par une prothèse en biomatériaux à base de sous muqueuse intestinale de porc. Ce matériel acellulaire contribue à la colonisation rapide par les cellules de l’hôte. La réalisation de la technique est aussi aisée que l’implant d’un filet synthétique et pas plus compliquée que la réalisation de la hernioplastie par transposition du muscle obturateur interne.

Cependant, il est difficile de se procurer ce biomatériau et son coût est assez élevé. Ces deux inconvénients majeurs font que la méthode est rarement utilisée en clientèle courante.

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Figure 12 : Pose d’une prothèse de sous-muqueuse intestinale de porc (Stoll).

Une alternative très intéressante à la sous-muqueuse intestinale de porc a été proposée en 2005. Le greffon est cette fois d’origine autologue puisqu’il s’agit d’un lambeau de fascia lata prélevé directement sur le patient.

Cette méthode présente l’avantage de permettre une réparation plus solide que celle effectuée par les techniques classiques de transposition musculaire. De plus, il y aurait moins de complications post opératoires. La technique permet de diminuer les tensions sur les sutures, de réduire la dissection des tissus mous, de diminuer la morbidité, de minimiser les risques d’effet corps étranger (sérome, fistule, infection, déhiscence de plaie) et occulte complètement le risque de rejet du greffon. La taille de la greffe est forcément adaptable à la taille de la hernie, puisque plus un chien est grand, plus il est possible de lui prélever un lambeau de fascia.
Les résultats à moyen ou long termes semblent être supérieurs à ceux obtenus avec les autres techniques d’hernioplastie.

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Figures 13 et 14 : Prélèvement et pose de la greffe de fascia latta (Bongartz).

Hernioplastie par transposition du muscle obturateur interne et/ou du muscle fessier superficiel (figures 15-16-17)

C’est l’une des techniques les plus répandues. Elle consiste en la désinsertion périostée du muscle obturateur interne dans sa portion caudale, depuis son insertion ischiaque jusqu’au bord caudal du trou obturateur. Il est important de ne pas léser le faisceau vasculo-nerveux obturateur.

Le volet musculaire obtenu est élevé et si sa taille est insuffisante pour combler le déficit de la hernie, une ténotomie peut être réalisée au ciseau pour gagner un peu plus de surface et mobiliser plus facilement le lambeau. Le nerf sciatique passe à proximité du tendon, il est donc important de l’identifier et de le préserver avant la ténotomie.

Une fois isolé, le transplant musculaire est suturé aux muscles voisins. Des points sont posés entre le muscle obturateur interne et le muscle sphincter externe de l’anus dégraissé, entre le muscle obturateur interne et le muscle rétracteur de l’anus et finalement entre le muscle rétracteur de l’anus et le muscle sphincter anal externe. Tous les points sont serrés en même temps.
Le principal avantage de la méthode réside dans sa facilité d’exécution si la ténotomie ne doit pas être réalisée. Un inconvénient majeur est parfois le défaut de pouvoir couvrant du lambeau musculaire et les risques de lésions de faisceaux vasculo-nerveux majeurs.
Pourtant, il s’agit d’une technique de référence, très régulièrement pratiquée.
Dans le cas où le muscle coccygien présente une atrophie importante, ou si la couverture obtenue par la transposition du muscle obturateur interne est insuffisante, le muscle fessier superficiel est également
- transposé pour venir combler la brèche périnéale. L’incision chirurgicale doit être à ce moment là beaucoup plus crâniale que pour la seule réalisation de la transposition du muscle obturateur interne.

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Figure 15 et 16 : Transposition du muscle obturateur interne (Ferrière).

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Figure 17 : Transposition du muscle fessier superficiel (Ferrière).

Tableau 1 : récapitulatif des avantages et inconvénients des différentes techniques de traitement des hernies périnéales (Sanspoux).

Technique Difficulté (1 à 5) Temps opératoire
(1 à 5)
Avantages Inconvénients
Herniorraphie. 2 2 Simple.
Rapide.
Taux de récidive peut être élevé.
Hernioplastie avec filet synthétique. 3 3 Plus solide que la herniorraphie. Coût des prothèses.
Effet corps étranger : possibilité de fistule, défaut de cicatrisation, sepsis,
Hernioplastie avec greffe hétérologue de sous-muqueuse de porc. 3 3 Plus solide que la herniorraphie.
Taux d’infection moins élevé qu’avec les implants synthétiques.
Plus solide que la herniorraphie.
Taux d’infection moins élevé qu’avec les implants synthétiques.
Hernioplastie avec greffe autologue de fascia lata. 3 4 Très résistante, plus solide qu’une hernioplastie par transposition musculaire.
Taille du greffon adaptable à la taille de la hernie.
Prélèvement aisé.
Deux sites chirurgicaux.
Transposition du muscle obturateur interne. 4 4-5* Très résistante, plus solide qu’une hernioplastie par transposition musculaire.
Taille du greffon adaptable à la taille de la hernie.
Ouverture chirurgicale limitée.
Convient pour les petites hernies.
Réalisation assez aisée si pas de ténotomie.
Volet musculaire parfois petit, nécessité d’une ténotomie.
Risque de lésions de faisceaux vasculo- nerveux majeurs.
Transposition du muscle fessier superficiel. 3 4-5* Solidité supérieure à la transposition du muscle obturateur interne.
Associée à l’élévation du muscle obturateur interne, elle permet de traiter des hernies de grande taille.
Incision cutanée plus importante.
Transposition du muscle semi- tendineux. 5 5 Intéressante pour les hernies ventrales.
Renforce les transpositions du muscle obturateur interne.
Incisions importantes.
Travail de suture.

*Selon l’expérience du chirurgien et l’association ou non d’une autre transposition.

Hernioplastie par transposition du muscle semi-tendineux

Cette reconstruction nécessite un abord chirurgical important, jusqu’en bas de la cuisse. Le muscle est sectionné transversalement et ramené sous le muscle sphincter extérieur de l’anus. Il est ensuite suturé avec le muscle obturateur interne hétérolatéral par son extrémité distale et ses bords latéraux sont fixés avec les tissus adjacents.
Cette méthode est généralement réservée aux récidives ou lors de hernie ventrale importante.

Traitement des lésions rectales associées (figures 18-19)

Le cas échéant, les lésions rectales doivent être traitées lors du temps périnéal.
Lors de dilatation rectale, des points en U perpendiculaires à l’axe du rectum sont réalisés dans la musculeuse. Tous les points sont serrés ensemble afin d’obtenir une plicature rectale qui diminue le diamètre de la lumière rectale. Il faut veiller à ne pas traverser la muqueuse par toucher rectal.

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Figure 18 : Mise en évidence d’un diverticule rectal sur un Border Collie.

Les saccules et les diverticules rectaux sont réséqués après avoir posé deux pinces non traumatiques à la base de la dilatation. Une première suture est réalisée sur la muqueuse et la sous-muqueuse, un deuxième surjet enfouissant ferme la séro-musculeuse. Il est impératif d’utiliser un fil de suture mono filament afin d’éviter les phénomènes de capillarité. L’étanchéité des sutures doit être parfaite.

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Figure 19 : Mise en place des pinces non traumatiques avant résection.

Soins postopératoires et complications

La gestion post opératoire des hernies périnéales doit être rigoureuse pour minimiser les risques de récidives et de complications.
La pose d’un pansement étant quasiment impossible, le port du carcan est obligatoire. Le site chirurgical sera nettoyé et désinfecté deux à trois fois par jour et au moins après chaque émission de selles. La constipation sera évitée en distribuant un régime mou, en plusieurs petits repas et à base d’un aliment hyper digestible pour diminuer le volume des matières fécales. Des laxatifs seront prescrits pour éviter au maximum les efforts de défécation.
La douleur sera gérée par des dérivés morphiniques si nécessaire les deux premiers jours post opératoires.

Différentes complications sont possibles. La première qui se rencontre dans 5 à 58 % des cas est l’infection de la plaie, qui requiert une grande attention. Dans ce cas, il ne faut pas hésiter à effectuer une culture bactérienne et un antibiogramme afin de cibler au mieux le traitement antibiotique.
Les autres complications rencontrées sont : la récidive de la hernie (5- 46 %), la constipation et le ténesme (5,5-44 %), l’incontinence fécale (0- 15 %) ou urinaire (2,9-18 %), des hémorragies de la plaie (0-17 %), le prolapsus rectal (0-15 %), où bien encore, une atteinte du nerf sciatique (0-5,5 %).
Les grandes variations rencontrées peuvent en partie s’expliquer par le nombre de cas traités dans chaque étude, la technique utilisée et la diversité des chirurgiens. Le tableau ci-après reprend la fréquence des différentes complications possibles.

Tableau 2 : récapitulatif des complications possibles (d’après Commère).

Type de complication Fréquence selon les auteurs (%)
Complication septique 5-58
Récidive de la hernie 5-46
Constipation, ténesme 5,5-44
Incontinence urinaire 2,9-18
Hémorragie de la plaie 0-17
Incontinence fécale 0-15
Prolapsus rectal 0-15
Atteinte du nerf sciatique 0-5,5

Pronostic

Le pronostic des hernies périnéales est étroitement lié à différents facteurs tels que la technique utilisée, le type de hernie, les lésions associées, l’habileté du chirurgien, les précautions pré, per et post opératoires. Il est généralement de moyen à bon lorsque l’opération est réalisée par un chirurgien confirmé. Les patients atteints de rétroflexion de la vessie ont un pronostic plus réservée et de lésions neurologiques préexistantes ne peuvent pas être corrigées par la chirurgie.

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